Je viens d’apercevoir, à cet instant, une manifestation concrète du résultat de nos semences éclairantes, étincelantes et colorées d’hier. Cela s’est produit, aujourd’hui même, dans le métropolitain ! J’ai, vous ne me croirez pas, voyagé au milieu d’une constellation de gens heureux qui, chose rare, n’étaient pas têtes baissées et n’espéraient pas seulement que la personne, assise non loin d’eux, se lève pour les laisser s’asseoir, bien qu’elle soit du même âge, peut-être un peu mieux préservée par le temps mais en tout cas un peu basanée… Non, ce matin, les visages étaient décrispés, aucun 20 minutes gratuit ne trainait par terre parce que personne n’avait voulu laisser bercer sa journée au catastrophisme prosac-tique (ça ne vous donne pas la maladie de Lyme mais c’est du pareil au même! Cela vous met KO de la même façon mais plus lentement !). Non, aujourd’hui les hommes et les femmes rencontrés étaient, cela se lisait sur leur visage, des personnes qui ne souffraient pas. Elles avaient peut-être souffert hier et souffriraient peut-être tout à l’heure mais à cet instant précis, elles ne souffraient pas. Elles étaient libérées.  Le métropolitain qui nous transportait, apparaissait quant à lui moins crasseux, éclatant de son utilité… Nous étions heureux d’en être les passagers et d’être là assis dans notre vaisseau presque spatiale… Notre pseudo vaisseau spatial nous transportait en nous permettant le luxe d’une rêverie éveillée. Nous étions nombreux ce matin. Nous nous reconnaissions. Les rêveurs se reconnaissent entre eux, une petite lueur apparait dans leur œil gauche au moment où ils s’évadent et si vous descendez votre regard, vous verrez leur main posée sur le cœur.  Êtres vivants humains et non humains (il y en avait aussi, de toutes sortes !), nous émanions de nos sourires, de nos regards, de nos aboiements, de nos miaulements et de notre calme… nous étions dans la vie, nous n’avions pas seulement la vie. Nous étions dans une constellation où chacun de nous, petites étoiles, plus ou moins filantes, nous étions connectées…et formions une unité de sens… qui avait du sens. Nous savions où nous allions…

Sans doute un hasard j’avais mis mes collants plumetis rouges, mon manteau vert, mon sac jaune et du vernis bleu… C’est une palette un peu primaire mais j’étais ainsi parée pour planter un arc-en-ciel.